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Montréal était l'hôte en 2006 des Jeux gais (ou Outgames), un événement international qui devait être une vitrine pour la ville sur le plan touristique. Une question qu'on s'est posée: est-ce que la chasse aux putes, aux punks et aux sans-abris était aussi un sport en compétition à ces Jeux?

 

DU FRIC POUR LES MARCHANDS...
ET DES FLICS POUR LES ITINÉRANTS!

_ texte tiré d'une brochure du Comité des sans-emploi
et de CLAC-logement


N.B. La situation décrite ici-bas s'applique à la venue des Jeux gais en 2006 à Montréal. Mais le même scénario s'est produit lors des Jeux olympiques de 76 à Montréal, à la différence qu'à cette époque, la communauté gaie et lesbienne était dans le camp des persécutés, et non pas des persécuteurs... (L'Histoire a de ces ironies des fois!)

 

L’argent attire l’argent, c’est bien connu. La pauvreté, surtout celle qui est très visible, attire quant à elle la flicaille.

Le 24 mars dernier, le comité exécutif de la ville de Montréal adopte un plan d’action de 3.2 millions$ destiné à refaire une beauté à la rue Sainte-Catherine. La ville va dépenser 1.6M$ pour refaire les trottoirs, l’éclairage, le pavoisement, le mobilier urbain et les traverses piétonnes.

Une somme additionnelle de 300,000$ va être dépensé en subventions aux propriétaires et locataires d’édifices commerciaux et un autre 200,000$ sera consacré à l’enlèvement et au nettoyage des affiches et des graffitis.

Parallèlement à cela, l’arrondissement Ville-Marie dépensera 1M$ en subventions pour la rénovation des façades et des commerces du secteur. Le prétexte de cette importante opération de chirurgie esthétique urbaine est la tenue de Jeux gais à Montréal, en 2006, pour lesquels la ville espère d’importantes retombées économiques.

Mais encore faut-il que la Ste-Cath soit présentable aux milliers de touristes gais qui viendront flamber leurs dollars US ou leurs Euros au centre-ville montréalais, ce qui explique pourquoi le comité exécutif souhaite que " la réalisation de ce projet soit accéléré de façon à procéder aux travaux le plus rapidement possible. "

Toutefois, les bureaucrates municipaux n’oublient pas que " le secteur ciblé est particulièrement touché par les problématiques sociales, notamment au niveau des jeunes itinérants. " Selon les documents officiels de la ville relatifs au plan d’action, les bureaucrates prétendent avoir " identifié les jeunes de la rue comme étant un groupe vulnérable aux changements qui s’opéreront dans le quartier ", c’est pourquoi un montant supplémentaire de 100,000$ sera dépensé pour " harmoniser aménagement urbain et réalité des jeunes de la rue. "

Le document de la vile ne précise pas de quelle façon les jeunes de la rue deviendront " un groupe vulnérable aux changements. " Cependant, un reporter du Journal de Montréal croit avoir démasqué les réelles intentions de la ville dans un article éloquemment intitulé: " Rue Sainte-Catherine : la ville veut éliminer les punks et les itinérants. "(1)

Exclus d’entre les exclus, les sans-abri sont en train de devenir les témoins gênants d’un processus d’embourgeoisement du quartier qui ne profite qu’à une minorité de parvenus. Jeux gais ou pas, la population itinérante est désormais la cible officielle du Service de police de la ville de Montréal (SPVM) depuis que le Conseil de ville a adopté, le 27 octobre 2003, le projet d’optimisation de la police de quartier.

En effet, le projet d’optimisation prévoit que la lutte aux incivilités va figurer en tête du palmarès des priorités de la " nouvelle " police de quartier. Selon le document officiel du SPVM, la " présence dérangeante d’itinérants " , la " présence dérangeante de mendiants " , la " présence de “squeegees” " et le " regroupement de jeunes sur la voie publique " sont assimilés à des actes d’incivilités et à des désordre sociaux. (2)

Cela ne signifie pas qu’il est devenu illégal de mendier à Montréal, mais plutôt que le harcèlement policier des jeunes et moins jeunes de la rue sera dorénavant une politique officielle au sein du SPVM, qui bénéficie de la bénédiction non moins officielle des élus municipaux.

D’ailleurs, l’appui de la ville à la politique de profilage social du SPVM ne devrait plus être un secret pour personne depuis que le conseiller municipal Peter Yeomans a déclaré publiquement que les sans-abri ne sont bienvenus " nulle part. " (3) Jusqu’à tout récemment, Yeomans était le responsable de la sécurité publique à la ville de Montréal, mais il a dû céder sa place lorsque ses riches concitoyenNEs de l’île Dorval ont voté en faveur de la défusion.

Une société qui tolère la persécution des plus pauvres d’entre les pauvres est vouée à se déshumaniser à s’enfoncer toujours plus profondément dans l’injustice, l’égocentrisme et la barbarie. Attendrons-nous que le centre-ville deviennent un ghetto à yuppies et une zone interdite aux laissés-pour-compte avant de réagir ??!!

 

Sources :
(1) Journal de Montréal, 29 mars 2004
(2) Le rapport d’Optimisation de la police de quartier est disponible
sur le site internet du SPVM, voir :
https://spcum.qc.ca/fr/nouv_pub/rapppubf.asp
(3) Le Devoir, 11 mai 2004